Dernière mise à jour le 19 May. 2025

La gestion forestière : un enjeu crucial pour l’avenir de nos forêts
NTF est fière de porter la voix des entrepreneurs ruraux dans LaLibre.be avec un message fondamental : nos forêts ont besoin d’une gestion équilibrée pour remplir toutes leurs fonctions – écologiques, économiques et sociales.
Dans cet article engagé, NTF défend une gestion forestière durable et active, essentielle pour :
- Renforcer la résilience des forêts face aux changements climatiques
- Préserver la biodiversité tout en maintenant une production locale de bois
- Garantir un équilibre entre les besoins environnementaux, sociaux et économiques
Une vision pragmatique, loin des oppositions stériles entre libre évolution et exploitation.
Voici l’article complet paru sur LaLibre.be le 14 mai 2025 :
Pourquoi la gestion forestière est essentielle pour nos forêts
Opposer frontalement "libre évolution" et "exploitation", c'est ne pas tenir compte des réalités écologiques, économiques et sociales du terrain.
Une récente étude de l’ASBL Forêt & Naturalité et de l’Université de Liège révèle que 80 % des Wallons soutiendraient le développement de forêts en libre évolution. Cette approche séduit par ses promesses : biodiversité renforcée, adaptation au changement climatique, retour à une nature « sauvage ». Mais celles-ci cachent des réalités bien plus complexes.
Laisser entendre que les forêts poussent mieux toutes seules est dogmatique et relève d’un raisonnement sophiste : c’est surtout réduire celles-ci à un unique rôle environnemental et nier les importants rôles économiques et sociaux.
Derrière l’adhésion, des perceptions déconnectées du terrain
Le paradoxe est frappant : alors que 53 % des forêts wallonnes appartiennent à de petits propriétaires privés –des entrepreneurs ruraux pour qui la vente de bois reste une source de revenu modeste mais essentielle pour la pérennité de la propriété et une grande partie du solde aux Communes qui en tirent un revenu important pour équilibrer leurs budgets–, la majorité des répondants aux enquêtes n’ont aucun lien direct avec la gestion forestière. Pourtant, ce sont ces propriétaires qui font face aux contraintes : coupes sanitaires ou de sécurité, gestion des arbres dangereux, replantation, protection des jeunes plants... Autant d’enjeux concrets rarement abordés dans les discours publics.
Certaines communications, relayées de manière orientée, semblent surtout destinées à faire pression sur le politique, en opposant frontalement "libre évolution" et "exploitation", sans tenir compte des réalités écologiques, économiques et sociales du terrain.
Gestion dynamique versus sanctuarisation rigide : sortir des caricatures
Présenter la libre évolution comme une fin en soi revient à cantonner le rôle des gestionnaires forestiers à celui de "gardiens de soins palliatifs" ou en "conservateurs de cimetières d’arbres", face au dépérissement causé par le changement climatique. Cette vision réductrice omet que la forêt est un écosystème vivant, façonné depuis des siècles par l’interaction avec l’homme.
Les forêts anciennes dites "subnaturelles" doivent paradoxalement leur biodiversité remarquable non à l'absence d'intervention humaine, mais à une exploitation ancienne et raisonnée. Une gestion attentive, sélectionnant les essences adaptées, maintient une dynamique forestière résiliente et permet aux Wallons de disposer d’une source de matière première locale et renouvelable. Craindre qu’une coupe ruine la forêt à jamais, correspond à redouter de finir chauve en allant chez un bon coiffeur.
L’enjeu de la filière bois : conjuguer les rôles économiques, sociaux et environnementaux.
A l’heure où il est primordial de disposer de ressources locales et renouvelables, où le bois est un matériaux de plus en plus demandé par les Wallons, il est paradoxal de vouloir mettre sous cloche les forêts wallonnes. Les adeptes de la « libre évolution » prôneraient-ils peut-être un approvisionnement en bois en provenance de Russie ou d’Amazonie ?
Avec 20 000 emplois en Wallonie, la filière bois ne peut être ignorée. "Nos entreprises ont déjà du mal à s’approvisionner en bois local", alertent ses acteurs. Réduire encore les volumes exploitables, sans alternatives crédibles, mettrait en péril toute la chaîne : des pépiniéristes et exploitants forestiers aux scieurs, en passant par l’artisan jusqu’au citoyen lambda qui exploite quelques houppiers pour son bois de chauffage. Qu’ils soient privés ou publics, les propriétaires forestiers doivent pouvoir garantir des revenus durables pour assurer l’entretien et la pérennité de leurs parcelles. Les labels volontaires (PEFC, Wildlife Estate, FSC) témoignent de cette volonté de concilier exploitation et respect des écosystèmes et de le faire savoir. Ces certifications, fondées sur des critères scientifiques, prouvent qu’une gestion active peut rimer avec biodiversité.
Les propriétaires de terres et de forêts qu’ils soient privés ou publics, acteurs par définition à long terme, sont soucieux de la résilience de leurs patrimoines. Ils sont donc les premiers à souhaiter et à œuvrer pour un avenir pérenne et durable de leurs biens. En témoignent les très nombreuses méthodes de sylviculture appliquées en Région wallonne : sylviculture irrégulière, forêts mélangées, coupes sélectives, essences adaptées, coupes rases et replantations [1]… Autant de pratiques qui assurent une production durable de matière première et un équilibre environnemental.
Ce sont les actions d’une multitude d’acteurs soucieux de la valeur de leurs forêts qui assurent cet équilibre entre les fonctions économiques, sociales et environnementales et la résilience de la forêt wallonne.
Conclusion : vers une vision forestière pragmatique et mesurée
Le débat sur la libre évolution oppose écologie et économie sans chercher un équilibre, si ce n’est à travers des subsidiations hypothétiques dans une région pourtant exsangue d’un point de vue financier . Les propriétaires privés, premiers acteurs de la gestion forestière, sont nombreux à s’engager dans des pratiques plus durables… à condition que celles-ci ne soient pas imposées de manière dogmatique.
La Wallonie a besoin d’une vision pragmatique de ses forêts : elles sont dans leur quasi totalité des espaces où l’homme reste un partenaire respectueux de la nature. Et si la vraie question n’était pas "faut-il plus de libre évolution en ce compris dans des massifs au riche potentiel d’exploitation ?", mais plutôt "comment faire en sorte que chaque forêt soit gérée de la manière la plus adaptée à ses enjeux écologiques, économiques et sociaux ?"
À méditer avant de légiférer.
[1] Les coupes rases ou coupe à blanc, sont des coupes pour organiser le renouvellement de la forêt. La Secrétaire Générale de l’ONF ‘l’Office National des Forêts françaises précise que les dépérissements massifs auxquels nous sommes actuellement confrontés obligent les forestiers à recourir à des coupes rases suivies de plantations d’essences capables de supporter chaleur et sécheresse.