Les Espèces Exotiques Envahissantes (EEE)

On désigne par EEE les espèces animales ou végétales introduites par l'homme hors de leur aire d'origine, causant des dommages à la biodiversité et aux services écosystémiques (production végétale, épuration de l'eau, etc.), ainsi que des nuisances socio-économiques. Face à cette menace, les propriétaires ruraux jouent un rôle clé grâce à leur connaissance approfondie du territoire et leur gestion attentive. Leurs efforts en faveur de la biodiversité doivent être reconnus et soutenus.

Un sujet d’actualité

Les Espèces Exotiques Envahissantes (EEE) rencontrées à la chasse : législation, identification, éthologie et observations, tel était le titre de la conférence donnée par Luc Baufay, véritable expert en la matière, lors de la réunion annuelle des représentants de NTF au sein des conseils cynégétiques.

Il est vrai que le problème est d’actualité ; il fait d’ailleurs l’objet de 3 passages dans la DPR [1]wallonne qui précise :

• De manière générale:

 « Avec les pouvoirs publics et les acteurs concernés, le Gouvernement renforcera les actions de prévention et de lutte contre les espèces invasives (animales et végétales) de manière à agir bien plus en amont et de manière réactive.

• Pour les aspects cynégétiques :

 « En concertation avec les conseils cynégétiques, le monde de la chasse et le DNF seront pleinement inclus dans la lutte contre les espèces invasives ».

• Pour le secteur apicole:

« Le Gouvernement poursuivra le plan apicole et verra comment mieux structurer le secteur pour améliorer la formation des membres, développer la recherche et améliorer les pratiques sur le terrain, notamment la lutte contre les espèces invasives ».

Synthèse de la conférence

La longue expérience de terrain transparaissait dans l’exposé passionnant qu’en a fait Luc Baufay, passant en revue le cadre légal et toutes les techniques de piégeage propres à chaque espèce envahissante. Nous en résumons l’essentiel.

  1.  Législation applicable aux EEE

Cadre législatif général

La réglementation des EEE est complexe et implique plusieurs législations. Traditionnellement, la chasse est régie par la loi du 28 février 1882, mais cette loi ne s'applique pas aux EEE, car elles ne sont pas considérées comme du gibier, à l'exception de la Bernache du Canada. Tirer sur une EEE n'est donc pas un acte de chasse. La Circulaire n° 2688 du 23 janvier 2007 permet aux chasseurs, gardes champêtres, occupants des biens et fonctionnaires du DNF[2] de réguler ces espèces sous certaines conditions.

Réglementations spécifiques

• Rats musqués : L’Arrêté Royal (AR) du 19 novembre 1987 impose de déclarer leur présence au bourgmestre, interdit leur élevage, détention, transport et commerce, et oblige la coopération lors des campagnes d’extermination.
• Protection et bien-être animal : La loi du 14 août 1986 interdit la détention d’animaux non indigènes, sauf exceptions pour des espèces déjà présentes avant l’adoption de la loi. Cette loi a été complétée par le Code wallon du bien-être animal du 4 octobre 2018.
• Normes internationales de piégeage sans cruauté : Issues d’accords internationaux (UE, Canada, Russie, USA), elles visent à réduire la souffrance des animaux capturés et à améliorer la sélectivité des pièges. Le Règlement (CEE) n° 3254/91 interdit les pièges à mâchoires.
• Règlement européen de 2014 : il vise une réponse coordonnée à l’expansion des EEE dans l'UE et impose la détection précoce, l’éradication rapide, ou la gestion (confinement et contrôle) des EEE. En Belgique, ce règlement a été transposé par un décret du 2 mai 2019 ; un Arrêté du Gouvernement wallon (AGW) du 15 septembre 2022 permet d'ajouter des espèces à la liste des EEE.

2. Régulation des EEE

Les moyens de régulation des EEE incluent :

• Armes autorisées pour la chasse : L’usage des armes pour tirer sur les EEE nécessite un permis.
• Pièges non létaux : Autorisés à l'exception des pièges à mâchoires, conformément au règlement (CEE) n° 3254/91.
• Appâts sélectifs et dispositifs acoustiques : Utilisés sous conditions légales strictes pour cibler uniquement les EEE.

3. Identification et Éthologie des EEE

Plusieurs espèces sont identifiées comme EEE préoccupantes :

• Rat musqué : Nocturne, inféodé aux milieux aquatiques, cause des dégâts aux cultures et à la biodiversité. Sa prolifération est contrôlée par des campagnes d’extermination.
• Bernache du Canada : Gibier d’eau soumis à des plans d’action spécifiques, incluant capture et euthanasie.
• Ouette d’Égypte : Territorial et agressif, interdit de détention.
• Erismature rousse, Ibis sacré, Muntjac, Raton laveur, Chien viverrin, Ragondin : Espèces diverses avec des comportements variés, allant du territorialisme à l’adaptabilité extrême, posant des menaces écologiques diverses.

4. Observations et Gestion des EEE

La gestion efficace des EEE repose sur une connaissance précise des populations présentes, obtenue grâce aux observations des chasseurs et des ONG. La Région Wallonne propose un site pour consigner ces observations, bien que d’autres sites soient également utilisés, parfois de manière biaisée. Une politique de gestion basée sur des données incomplètes ou erronées peut conduire à des décisions inefficaces. Une meilleure diffusion et utilisation des informations fournies par les chasseurs permettraient de mieux traiter le problème des EEE.

Conclusion

Les EEE représentent une menace pour la biodiversité et nécessitent une gestion rigoureuse. La législation belge et européenne fournit un cadre légal pour leur régulation, bien que la mise en œuvre de ces mesures soit complexe. La collaboration entre les autorités, les chasseurs et les propriétaires ruraux est essentielle pour lutter efficacement contre la prolifération de ces espèces. Les efforts en matière de formation, d'observation et de gestion doivent être soutenus et améliorés pour assurer la protection des écosystèmes locaux.

Un chaleureux merci à Luc Baufay pour le superbe exposé qu’il a donné ce printemps !

Vous trouverez son support de présentation en 

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